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Extrême Orient Russe Version imprimable Suggérer par mail

 

 

Lundi 16 juin 2008

Kafka serait-il Russe ?

La Compagnie maritime est fermée le week-end, elle ouvre le matin à 10 heures et souvenons-nous qu'il y a un seul bateau par semaine, le lundi... donc aujourd'hui.

Episode 1
Il est 9h30 pétantes quand, avec Sylvie nous arrivons devant les bureaux de la compagnie. La « charmante hôtesse pintade » blonde refuse de nous vendre les billets si nous n'avons pas les documents douaniers pour les sides. Elle nous précise également que nous ne les aurons pas dans la journée car très compliqués à obtenir et que de toute façon après 16h30, elle ne vend plus de billets.
Bon, le contexte est posé. Elle nous écrit l'adresse de la douane (qui est de l'autre côté de la ville), et nous prenons un taxi (qui conduit d'ailleurs comme dans le film du même nom).
Nous passons plus d'une heure dans les innombrables bureaux de cette douane et l'on arrive à comprendre qu'il nous manque soi-disant des papiers.
Nous rencontrons Frédéricks, suédois parlant anglais qui nous explique qu'il faut passer par un broker, et que cela coûte environ 5000 roubles. Bien. Il est déjà midi, nous courrons chez ce broker (qui ne parle pas un mot d'anglais), nous arrivons à nous faire comprendre et il nous donne rendez-vous à 13 heures à la douane où nous retournons. Il arrive à l'heure, et par miracle (on a toujours pas compris pourquoi), « l'inspector», en habit militaire, femme style « garde-chiourme, porte de prison » commence à nous faire nos papiers.
Le broker, quant à lui s'en va, sans rien nous demander.

Episode 2
Il est 13h30. Le garde-chiourme nous demande d'attendre une heure pour que nos papiers soient signés. Nous sommes encore dans les temps pour avoir les billets du bateau de ce soir.
Nous voyons défiler des centaines de personnes, des tonnes de papiers à la main : il s'agit des convoyeurs de voitures japonaises croisés sur les routes.
Garder sa patience et son flegme ! Seul, l'officier, gardien des lieux parle un peu anglais. Quand nous lui expliquons la situation, il baisse les bras en disant « c'est la Russie ». Nous le surnommons Mirza.

Il est 15 heures. Toujours pas nos papiers. Je vais voir la garde-chiourme qui refuse de me répondre, elle ne lève même pas la tête.
Je demande à Mirza où est le bureau du « Boss ». Il m'amène au premier étage du bâtiment et me montre un bureau. Changement de décor : moquette, tableaux et photos au mur, nous sommes à l'étage du pouvoir.
Le Boss s'appelle Sergueï Allessandrovitch (son nom est écrit en lettres dorées sur la porte). Je frappe et j'entre. Bureau de 50 m2, deux personnes étonnées de me voir : le boss, assis, chemise blanche avec quelques décorations et un jeune assistant, debout, des papiers à la main. Je prends ma respiration « Good evening Serguei Allessandrovitch, do you speak english ? ». Il me fait signe que oui (mais en fait surtout son assistant) et de continuer. Je n'avais rien préparé, mais tout est venu d'un coup : nos interminables heures d'attente, nos questions sans réponse, le fait que l'on nous traite comme des chiens, l'incompréhension devant ce que l'on nous demande et surtout le fait que dans une heure, nous devons prendre nos billets de bateau, et qu'il est hors de question d'attendre 6 jours pour le prochain.
Deux secondes de silence.
Il sourit légèrement et passe deux coups de téléphone. Son assistant me demande de le suivre. Et là, nous tombons dans la quatrième dimension : nos papiers sont faits en 15 minutes, la garde-chiourme nous regarde, esquisse un sourire, nous propose même du café...
Il est 15h45. Un homme surgit : la quarantaine, parlant parfaitement anglais. Il me dit « suivez-moi, je m'occupe de vous, où sont les motos ? ». Nous montons dans sa voiture, direction le parking du port, où nous attendent depuis ce matin Alain et Michel (qui sont en train de se faire interviewer par la télé locale).
Nous fonçons au terminal d'embarquement, sortons nos bagages et les motos sont prises en charge pour être garées dans le bateau.
Entre temps, l'homme nous amène prendre nos billets. Le bureau est fermé. Il sonne, montre un papier et nous pouvons entrer. La pintade blonde de ce matin nous dit que nous ne pouvons payer par carte bancaire mais uniquement en cash et en dollars...

Avec l'homme, nous courrons à la banque de l'autre côté du port. Il nous faut 2 000 dollars et le distributeur ne donne que des roubles (et pas plus de 5 000 à la fois). Calcul express. Il nous faut 40 000 roubles. La carte bleue internationale chauffe (8 retraits différents). Puis il entre dans la banque, montre son papier et la guichetière lui donne l'équivalent en dollars.
16h30 : retour à la compagnie maritime, nous avons enfin nos billets !
L'homme nous dit brièvement au revoir et s'en va...
Après réflexion (et peut-être sous influence de tous les polars que j'ai pu lire, quoique...), je me dis que cet homme doit faire partie de l'ex KGB. Toutes les portes se sont ouvertes devant lui, sans un mot, juste en montrant ce fameux papier. Je ne saurai jamais. Allo inspecteur Vallander ? (je sais que certains suivent, Luce, Maz, vous êtes là ?).

Ouf... journée nerveusement épuisante mais nous pouvons partir.
    
A l'embarquement, nous retrouvons Frédériks, le suédois.
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Il s'en est sorti à peu près comme nous. Il nous raconte que le mois dernier, un anglais a mis plus de 2 semaines pour pouvoir partir...
Frédériks est photographe professionnel et travaille en free-lance et pour des journaux. En vacances pour trois mois avec son père (qui ne parle plus car il a eu un AVC), il a fait la même route que nous en voiture depuis la Suède, part pour le Japon, puis pour les USA.

A 22 heures (pas mal de retard...), le bateau quitte enfin Vladivostok et la Russie.
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Dans quarante heures environ, le pays du soleil levant.

 

 

 

 



Dernière mise à jour : ( 19-06-2008 )
 
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